Le romarin et la santé du foie: de nouvelles preuves Gilles Corjon – Cet arbrisseau typique des maquis et des garrigues méditerranéennes a toujours été un symbole de renouveau et d’éternelle jeunesse en raison de ses feuilles toujours vertes et de ses fleurs bleu pâle qui s’épanouissent presque toute l’année. Ses sommités fleuries récoltées de mai à septembre et ses jeunes pousses ramassées au printemps sont connues depuis longtemps pour leurs propriétés cholérétiques et hépatoprotectrices. Le romarin stimule la sécrétion biliaire et assiste les fonctions de détoxication du foie en activant de précieux enzymes comme la glutathion S transférase et la quinone réductase. La protection des cellules hépatiques est en grande partie liée à l’activité anti-oxydante et anti-inflammatoire de plusieurs composés comme des diterpènes phénoliques caractéristiques (carnosol, acide carnosolique, rosmanol), des acides phénols comme l’acide rosmarinique et des acides triterpéniques bien connus (acide oléanolique et ursolique). Jusqu’à présent, il était admis que le romarin ne pouvait jouer un rôle hépatoprotecteur qu’à titre préventif mais ne pouvait pas favoriser la régénération des hépatocytes contrairement à d’autres plantes hépatiques majeures comme les semences de chardon-marie ou les baies de schizandra( Schizandra sinensis). Une étude récente réalisée par une équipe de scientifiques chinois a pu démontrer, dans un modèle expérimental animal, que la consommation de romarin pouvait accélérer la production de nouvelles cellules hépatiques. Cet effet régénérateur serait en grande partie dû à un des composants du romarin : l’acide rosmarinique. L’acide rosmarinique est un composé phénolique que l’on trouve dans de nombreuses plantes de la famille des Lamiacées (romarin, sauge, sarriette, mélisse, basilic, menthes, brunelle….) . Il participe comme d’autres composés polyphénoliques à la protection des végétaux contre plusieurs de leurs prédateurs. Chez l’homme, l‘acide rosmarinique, qui est hydrosoluble, est facilement assimilé au niveau intestinal puis conjugué et méthylé au niveau hépatique. Une partie est métabolisée sous forme d’autres acides phénols comme l’acide caféique ou l’acide férulique. Plusieurs études ont démontré que l’acide rosmarinique possédait d’excellentes propriétés anti-oxydantes , anti-inflammatoires et hépatoprotectrices ainsi que des propriétés antivirales et antibactériennes . L’acide rosmarinique est également l’un des composés majeurs d’une plante médicinale (Heliotropium foertherianum) utilisée traditionnellement en Polynésie pour lutter contre la ciguatéra (appelée communément la gratte), une intoxication liée à la consommation de poissons contaminés par des toxines marines produites des algues microscopiques. Les recherches conduites par l’IRD (Institut de recherche pour le développement) ont révélé que l’acide rosmarinique ne traitait pas seulement les symptômes de la gratte mais aussi ses causes par son pouvoir détoxifiant et hépatoprotecteur. Pour en revenir au romarin , il faut noter que les jeunes pousses exercent une activité protectrice du foie, supérieure à la plante entière car elles contiennent davantage d’acides phénols comme l’acide rosmarinique , chlorogénique et caféique. Gilles Corjon Docteur en pharmacie, herboriste Références: Rosmarinic acid stimulates liver regeneration through the mTOR pathway.Lou K1, Yang M2, Duan E2, Zhao J2, Yu C2, Zhang R3, Zhang L3, Zhang M2, Xiao Z4, Hu W5, He Z6. Phytomedicine. 2016 Dec 1;23(13):1574-1582. doi: 10.1016/j.phymed.2016.09.010. Epub 2016 Sep 30. Actualité scientifique IRD fiche n°338 Janvier 2010 Rossi F., Jullian Valérie, Pawlowiez R., Kumar-Roine S., Haddad Mohamed, Darius H. T., Gaertner-Mazouni N., Chinain M., Laurent Dominique. Protective effect of Heliotropium foertherianum (Boraginaceae) folk remedy and its active compound, rosmarinic acid, against a Pacific ciguatoxin. Journal of Ethnopharmacology, 2012, 143 (1), p. 33-40. ISSN 0378-8741