reflexion d’un herboriste (2ème partie) L’impact des activités humaines sur l’ensemble de notre planète est aujourd’hui si destructeur que nous hypothéquons les ressources naturelles des générations futures. A terme, si nous persistons dans notre usage actuel du monde, le risque d’extinction de l’espèce humaine avoisine les 100%. Oui mais l’annonce de cet état de fait est il suffisant pour changer notre rapport au monde ? Les paquets de cigarettes arborent la mention « fumer tue », le tabagisme a t’il cessé pour autant ? L’émergence d’une nouvelle façon de penser le monde ne peut pas s’accomplir dans le sillon des discours rebattus du style « on est tous responsables »ou celui des adeptes du grand « Yaka » : « yaka produire moins », « yaka mieux répartir les richesses » … Autrement dit, la théologie de la croissance ne peut pas être combattue sur son propre terrain. Alors, le récit d’un monde nouveau est il possible ? Sans aucun doute, mais à condition que son attractivité soit telle que notre manière d’être et d’agir à ce jour nous apparaisse comme vide de sens. Pour cela, il nous faut : rétablir le lien (voir 1ère partie) identifier les obstacles au changement « ré enchanter » la vie Identifier les obstacles au changement : En premier lieu, une vision anthropocentrique qui ignore la cohérence profonde du monde est l’un des plus grands obstacles à un changement de paradigme. Deux révolutions dans le monde de la connaissance sont venues récemment ébranler cette vision. 1/ L’étude des sociétés animales remet en cause le dogme selon lequel la société humaine a pour fondement la culture. La culture n’est plus un phénomène propre à l’être humain mais au vivant et on peut l’appréhender comme une stratégie que le vivant adopte pour se développer. Les cultures humaines se singularisent par le fait qu’elles y ajoutent une dimension symbolique fondée sur notre remarquable capacité à créer des mondes imaginaires. 2/ Les conditions nécessaires à la vie existent partout dans l’Univers : en calculant qu’il existe un nombre astronomique de planètes semblables à la notre dans l’Univers, nous venons de répondre à la question d’Aristote qui se demandait si la Terre était unique. « la Terre et le système solaire sont juste UN parmi des milliards dans la galaxie. L’univers a des milliards de milliards de planètes » Geoffrey Marcy astrophysicien University of California Berkeley. En deuxième lieu, une représentation faussée de la réalité : au-delà de la prospérité, du confort matériel et du mythe du progrès, force est de constater que la logique qui sous-tend notre modèle économique productiviste est aussi le vecteur de luttes d’intérêts, de conflits permanents, de l’obsession maladive de la réussite individuelle et de la marchandisation des rapports humains. Cet état de tension incessant peut fragmenter notre conscience au point que personne aujourd’hui ne peut prétendre être exempt de maladies mentales. Pour les peuples « premiers » que je préfère appeler les « hommes vrais », la santé est indissociable des principes qui structurent la société. Un bon état de santé individuel favorise un bon état de santé du groupe social, de la famille …et réciproquement. Les chamans, les indiens et les herboristes partagent une même vision de l’Universel. Seul le retour à l’unité peut nous guérir de notre vision morcelée de la réalité qui est en fait la cause unique de toute souffrance. Ré enchanter la vie : une utopie nécessaire La solution à cet aveuglement ne consiste pas à vaincre notre soi-disant « nature agressive » mais à permettre à nos dispositions ordinaires de gouverner notre vie. « Ce qui est essentiel est invisible à nos yeux « aurait dit Antoine de St Saint-Exupéry . La plupart des hommes ignorent que les habitants du sol (vers, microorganismes …), ces travailleurs de l’ombre, sont bien plus nombreux que tous ceux qui vivent en surface. Ils sont pourtant à l’origine de tous les processus biologiques. Mais si la terre que nous foulons est un monde encore inconnu, que dire alors des continents de notre propre esprit ? D’immenses gisements de créativité sont à notre portée : notre aptitude à l’émerveillement et nos capacités à faire émerger une compréhension élargie de notre Univers ne demandent qu’à croître…voilà d’ailleurs où se situe la vraie croissance. Et si finalement la crise écologique était moins un problème en attente d’une solution qu’une opportunité de rêver le monde autrement ? Choisir notre bonheur dans d’autres sphères que celles des biens matériels qui nous tiennent éloignés de notre vraie nature : le monde spirituel. Je vous livre cette réflexion de J.Philippe Pierron Maître de conférence en philosophie à Lyon III « être contemporain d’une utopie, ce n’est plus alors rêver, c’est réveiller le temps du projet qui sommeille en nous » Gilles Corjon Extrait et résumé de la conférence : « les fondements de nos sociétés sont ils contre nature ? »